Pourquoi notre association s’arrête

Prendre le droit est une association féministe rennaise qui a été créée en 2013.
Au bout de 10 années d’activité, l’association ne veut plus écoper le patriarcat à la
petite cuillère !


Prendre le droit a été créée dans le but de… Prendre le droit ! Le droit de se battre
contre la machine à produire et reproduire des violences sexuelles, qui ont lieu
partout et tout le temps, le droit de se battre avec les outils de connaissance du
droit que nous avons et que nous voulions partager, le droit de rêver à un autre
droit, à une autre justice qui serait réellement un outil de lutte contre cette société
où les violences sexuelles commises par les hommes sont massives.

Nous avons rêvé (et rêvons toujours) à la fin du patriarcat, à la fin du violarcat, ce
système qui fait de nous, dés le plus jeune âge, des objets pour les agresseurs, et
qui nous soumet aux normes les plus aliénantes.


En attendant cette révolution, nous avons critiqué le droit, réfléchi à la manière
dont la justice devrait être rendue, à d’autres définitions des violences sexuelles,
qui ne reposeraient pas sur le fait que les victimes doivent elles-mêmes apporter
toutes les preuves de ce dont elles sont victimes.

En attendant des lois mieux écrites, nous avons pris le train de ce système
judiciaire injuste, aux côtés des victimes, pour atténuer leurs souffrances quand,
irrémédiablement, ce train finit par dérailler. Nous avons constaté que l’écoute
féministe que nous proposions était saluée et reconnue par les victimes, qu’une
approche structurelle des violences sexuelles pouvait politiser ces violences et
donner de la force, mais que l’impunité et l’immunité des agresseurs restait la
règle.

Nous avons constaté mille fois les délais hallucinants, les dépôts de plainte
humiliants, les refus de plainte, la culpabilisation des victimes, les propos sexistes
des médecins, des avocats, de la police et des juges, les non réponses, les
classements sans suite, les défauts de procédure, la précarisation dans laquelle le
« temps » de la justice et les frais de justice précipitent les victimes, les montants
toujours trop élevés des suivis médicaux, l’impossibilité de se soigner faute de
moyens, la complaisance avec les agresseurs, les interrogatoires menés à
décharge pour eux, à charge pour les victimes, l’isolement des victimes, leur
sentiment amer, profond et destructeur d’être seules… Nous avons constaté que
la justice, en plus d’être sexiste, était classiste et raciste.

Nous avons constaté que la justice, au-delà de ne pas rendre justice, constituait la
plupart du temps une double peine pour les victimes.

Nous avons constaté que le système judiciaire était empreint de culture du viol, à
tous les niveaux. Et que cette empreinte ne pourrait se résorber à coups de petites
formations deci-delà, d’un gendarme ou d’un magistrat.

Nous avons crié, nous avons pleuré, nous avons été en colère.
Nous sommes en colère.


Tant qu’on peut être ministre et violeur, ministre et défendre « l’inceste heureux »,
tant qu’un président salue un acteur notoirement connu pour être un agresseur
comme « un grand artiste », et on en passe, rien ne bougera. Tant que les
gouvernements successifs ne mettent pas les moyens contre les violences
sexuelles, rien ne bougera. Tant qu’on ne traitera pas les violences sexuelles sur
les femmes et les enfants comme le problème de santé publique numéro 1 dans
le monde, rien ne bougera.

En 10 ans, notre association féministe – et bénévole – a accompagné et conseillé
une centaine de femmes dans leurs démarches judiciaires, ou dans leurs
questionnements d’en entamer. Certaines militantes sont là depuis le début,
d’autres sont parties, d’autres ont eu besoin de pauses. Depuis deux ans, nous
allons de pauses en redéfinitions, de nouvelles tentatives de trouver justice en
envie de nous cryogéniser pendant mille ans et de réapparaitre sur une île non-
mixte…

Nous n’avons jamais pensé que le patriarcat disparaitrait uniquement grâce à des
lois. Nous n’avons jamais pensé que la répression pouvait éradiquer les violences.

Par contre, nous pensons que la manière dont un pays légifère sur telle ou telle
infraction et met en œuvre ces lois a des incidences sur l’ordre social. Quand 90%
des plaintes pour violences sexuelles sont classées en France, c’est bien ce
message qui est envoyé aux hommes : violez, allez-y, continuez à violer, il ne vous
arrivera rien !

Nous continuons de penser que le système judiciaire devrait être un des outils
pour remettre le monde à l’endroit. Nous pensons aussi que les victimes et leurs
soutiens doivent trouver des alternatives à cette justice injuste. Nous pensons que
créer des cadres pour écouter les victimes est primordial.

Mais la petite poignée de militantes que nous sommes est épuisée, n’a pas trouvé de relai, de relève, et nous allons dissoudre l’association courant 2025. La violence des hommes et la violence de « leur » justice nous a épuisées.

Notre action était complémentaire d’une multitude d’énergies féministes qui se déploient à Rennes et ailleurs… Notre énergie se déploiera ailleurs, et nous continuerons à Prendre le droit !

Ce site et toutes ses ressources resteront en ligne!

Les militantes de Prendre le droit, novembre 2024

Samedi 3 février 2024: atelier d’information et de critique juridique

Vous avez subi des violences sexuelles

Vous avez déposé plainte, vous voulez en témoigner

Vous voulez déposer plainte, vous avez encore des questions

Vous vous interrogez sur un éventuel dépôt de plainte

–> ATELIER D’INFORMATION ET DE CRITIQUE JURIDIQUE

En non-mixité Femmes

3 février 2024 10-13h

Pôle Associatif Marbaudais (LigneB/C5- GrosChêne)

INSCRIPTIONS OBLIGATOIRES ICI

TRACT CI-DESSOUS:

Mercredi 17 janvier 2024: rassemblement contre les classements sans suite

STOP aux violences sexuelles et aux violences judiciaires

STOP aux classements sans suite

Après 10 années d’existence, une centaine d’accompagnements et 98% de classements sans suite, les militantes de l’association Prendre le droit sont usées d’écoper le patriarcat à la petite cuillère !
Et leur constat est clair : culture du viol partout, justice nulle part !

À Prendre le droit, nous ne pensons pas que la répression judiciaire soit la solution pour éradiquer les violences. Nous n’aimons pas la prison. Nous voulons la révolution féministe, la fin du patriarcat, la fin des violences ! Mais en attendant ce monde merveilleux, nous écoutons et soutenons les victimes que nous accompagnons et qui ressentent le besoin d’être entendues et reconnues par la justice, par l’État.

Elle fait quoi, cette justice ? Il fait quoi, cet État ?

Malgré la communication autour des violences faites aux femmes (qui sont une des grandes priorités du gouvernement actuel LOL) et l’injonction à déposer plainte faite aux victimes de violences sexuelles, les moyens accordés sont ridicules !
Le scénario classique est le suivant : les victimes sont prévenues de la forte probabilité du classement sans suite dès le dépôt de plainte, l’enquête menée est sommaire, mais pour autant elle dure des mois voire des années, pour se solder par un classement sans suite rarement notifié aux victimes !
Mais heureusement, l’État créé des hotlines, des 3919, des hashtags… #nerienlaisserpasser, ce hashtag qui incite les victimes à parler et à se saisir de la justice, nous fait particulièrement rigoler : ce que l’État ne laisse pas passer, ce sont les plaintes !!!

80% des plaintes pour violences sexuelles sont classées sans suite par les procureur.e.s. Seulement 1% des viols aboutissent à une condamnation devant une cour d’assises !

Le message est clair:

Pour les agresseurs, c’est l’impunité !

Pour les victimes, c’est la double peine : violences sexuelles, puis violences judiciaires !

En attendant une Justice féministe,
prenons notre colère et notre énergie et soyons nombreux.ses à venir dire STOP aux violences judiciaires et aux classements sans suite, à l’endroit même

où les plaintes sont classées :

RASSEMBLEMENT DEVANT LA CITÉ JUDICIAIRE
MERCREDI 17 JANVIER 2024, 16H

TRACT CI-DESSOUS: