Histoire de la pénalisation des violences sexuelles en France

C’est le Code pénal napoléonien de 1810 qui introduit l’interdit des violences sexuelles dans la loi. Elles sont réprimés dans le chapitre « Attentats aux mœurs ». Le harcèlement sexuel n’est alors pas répréhensible.

L’article 330 disait : « Toute personne qui aura commis un outrage public à la pudeur, sera punie d’un emprisonnement de trois mois à un an, et d’une amende de seize francs à deux cents francs ».

L’exhibition sexuelle est l’équivalent contemporain de l’outrage public à la pudeur.

L’article 331 : « Quiconque aura commis le crime de viol, ou sera coupable de tout autre attentat à la pudeur, consommé ou tenté avec violence contre des individus de l’un ou de l’autre sexe, sera puni de la réclusion. »

Les articles suivants aggravaient la peine si le crime de viol était commis :
– sur un mineur de moins de quinze ans : peine des travaux forcés à temps.
– les coupables sont de la classe de ceux qui ont autorité sur la personne envers laquelle ils ont commis l’attentat, s’ils sont ses instituteurs ou ses serviteurs à gages, ou s’ils sont fonctionnaires publics, ou ministres d’un culte, ou si le coupable, quel qu’il soit, a été aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes : perpétuité.

L’expression « tout autre attentat à la pudeur » vise ce qui est aujourd’hui appelé une agression sexuelle. Ce qui est dorénavant un délit était donc un crime.

Le « crime de viol » n’était pas défini laissant aux magistrats le soin de le faire. La jurisprudence a longtemps considéré que le viol n’était que la pénétration forcée du sexe d’une femme par le sexe d’un homme. Il n’était retenu que lorsque l’homme avait utilisé la violence pour violer une femme. A cette époque, le viol n’est possible qu’en dehors du mariage (pas de viol possible d’un mari sur son épouse) ; les hommes ne peuvent pas être violés ; un viol annal, buccal, digital est un attentat à la pudeur.

En 1857, l’arrêt Dubas (toujours en vigueur) introduit les éléments de surprise et de contrainte. Le « cas d’espèce » était le suivant : Un homme s’est introduit dans le lit d’une femme qui pensait qu’il s’agissait de son mari. Elle s’est rendu compte après le « rapport » sexuel qu’elle avait été « trompée sur la marchandise ». Le viol par « surprise » est consacré. La cour de cassation prend par ailleurs une position de principe : « le crime de viol consiste dans le fait d’abuser une personne contre sa volonté, soit que le défaut de consentement résulte de la violence physique ou morale exercée à son égard, soit qu’il résulte de tout autre moyen de contrainte ou de surprise pour atteindre, en dehors de la volonté de la victime, le but que se propose l’auteur de l’action ».

En 1980, une loi définit pour la première fois le crime de viol, en reprenant les éléments de la jurisprudence de toutes les années passées. Le viol est alors définit comme : « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte ou surprise ».

Il est donc faux de croire, comme c’est le cas souvent, que le viol a été criminalisé en 1980.

Au même moment, les agressions sexuelles (« attentats à la pudeur ») deviennent des délits, punis de cinq ans d’emprisonnement et non plus des crimes. Le viol est alors punit de 10 ans d’emprisonnement alors qu’il était punit de la réclusion à perpétuité avant.

Avec la réforme du code pénal en 1992, entrée en vigueur en 1994, les « menaces » sont ajoutées dans les moyens utilisés par l’agresseur pour violer. L’échelle des peines du code est entièrement revue, le crime de viol est désormais punit de 15 ans de réclusion criminelle.

En 2006 : Une modification très dangereuse du crime de viol complété par : « dans ce cas (le mariage) la présomption de consentement des époux vaut jusqu’à preuve du contraire » est introduite dans le code pénal. La loi validait donc une présomption de consentement aux actes sexuels entre époux, sans susciter l’effroi des associations féministes, hormis l’AVFT (Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail).

Grâce à son action, cette notion a heureusement été supprimée par la loi du 09 juillet 2010.

Bientôt l’histoire de la pénalisation du harcèlement sexuel !

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